Epilogue (3)
Par Alexandre Vaughan
L’œil rivé sur son télescope, Lanea essayait en vain de repérer les débris de Dalhin. C’était peine perdue. L’engin spatial qui avait permis aux Anciens de coloniser ce monde avait disparu. Aridel avait parfaitement accompli sa mission, et la cité céleste était intégralement détruite. Ce qu’il en restait était probablement bien trop petit pour être aperçu avec un miroir d’un si faible diamètre.
Presque malgré elle, Lanea éprouvait un certain regret. Il y aurait tant eu à apprendre dans cet endroit, dernier vestige de la gloire et de la science des Anciens. Erû lui même, une intelligence artificielle dont l’étendue était presque inimaginable aurait été un sujet d’étude à part entière. Lanea avait cependant bien conscience que la curiosité pouvait parfois être dangereuse. Les connaissances que recelaient la cité auraient sûrement, un jour ou l’autre, été utilisées à des fins néfastes. Oeklos en était la preuve.
Une question se posait d’ailleurs toujours. Erû était-il réellement hors d’état de nuire ? Avait-il encore une influence sur le monde ? Lanea n’avait pour l’instant aucun moyen d’en être absolument certaine. La destruction de Dalhin avait été confirmée par les observations, mais l’entité aurait très bien pu se copier dans l’un des sanctuaires qui existaient encore à la surface d’Erûsarden. Lanea devrait tôt ou tard trouver des réponses définitives à ces questions.
Une chose était cependant certaine. Oeklos, tout comme Aridel, avait trouvé la mort dans le cataclysme qui avait détruit la cité céleste. Et le sacrifice du souverain d’Omirelhen avait permis au monde de retrouver un nouveau visage.
Parfois, Lanea se demandait quel serait réellement son rôle dans le nouveau paysage qui se dessinait devant elle. A la suite de l’éruption de L1, le peuple des mages avait quasiment disparu. Dafashûn, leur royaume, n’était plus qu’un souvenir. D’une certaine manière, ce n’était peut-être pas un mal, pensa Lanea, non sans ressentir une certaine culpabilité. Le monde n’avait pas besoin d’archimages bigots qui l’auraient ancré dans un passé révolu.
Pour la première fois, se félicita la jeune femme, humains et Sorcami travaillaient ensemble, dans un objectif de construction et non en vue d’une guerre. Lanea veillerait à ce que cette nouvelle alliance reçoive des mages survivants le savoir dont ils avaient besoin. Elle n’allait pas, comme l’avaient fait ses ancêtres, leur bloquer l’accès à la connaissance. La mage n’avait aucune envie de fonder un nouveau Dafashûn. L’intransigeance de ses pairs avait été le terreau qui avait permis la naissance des mages noirs et l’avènement d’Oeklos.
Lanea quitta le balcon et son regard passa du ciel étoilé à la cité de Niûrelhin. L’architecture de la capitale d’Omirelhen lui paraissait étrange, et par certains cotés presque primitive. Elle découvrait comment vivaient les hommes de Sorcasard, elle qui, quelques mois auparavant, n’avait jamais quitté l’île-continent de Lanerbal. Elle se trouvait à présent dans la ville qui avait vu naître Aridel, aux portes de Sorcamien, et elle savait que son voyage à travers le monde ne faisait que commencer. Lanea se sentait prête pour ce nouveau départ.